2010, A. Roche, artiste céramiste

Anne Roche, plasticienne et céramiste auvergnate, à réalisée une installation intitulée « Comme un manteau posé sur la mémoire des hommes ».

Je considère la notion de "culture de la paix entre les peuples" de manière poétique comme un manteau posé sur la mémoire des hommes. J'envisage le manteau comme un élément de soin apporté à notre mémoire, collective et individuelle. Il permet de protéger et de réchauffer ce bien précieux et fragile qu'est la mémoire. Il veille à sa vitalité. Faire acte de mémoire est fondamental pour cultiver la paix entre les peuples.

Comment évoquer la paix sans penser à la guerre? Ces deux notions semblent indissociables. Ainsi l'installation est ambivalente. Elle incarne la sauvegarde de la mémoire, la paix aussi bien que l'absence et la guerre. Le lit de "bols crânes" sans son pardessus renvoi renvoie à l'ossuaire, aux casques, à la guerre.

Sous un manteau, posés sur le sol retourné, les bols crânes appellent le souvenir. La mémoire siège dans notre corps. Elle réside dans nos pensées, notre cerveau en est l'organe.

Pourquoi des bols? Un bol contient de la nourriture. Le bol originel fut conçu pour contenir et conserver la "source de vie". Le bol est ancestral et universel, c'est un outil. Le crâne appartient à l'individu ; sa multiplication témoigne de l'humain plus largement. Le crâne contient le savoir qui nourrit, qui humanise.  Pour élaborer cette oeuvre, j'ai fais appel au public, en collectant des mots pour réfléchir ensemble à la notion de paix. Quels pourraient être ces mots : équilibre, partenaire, protection...?
Chaque mot sera ensuite "tatoué" à la surface du bol. Il fera corps avec le crâne devenu page. Le langage véhicule la pensée. Il transmet le souvenir. Le langage témoigne de la nécessité à communiquer, à échanger. Cet échange vise à tisser des liens.

Le lien sociabilise. Il apporte la fluidité nécessaire au bon fonctionnement de groupe. Sans lui l'individu est isolé, livré à lui-même donc bestial. Il est alors incapable de concevoir l'autre comme un partenaire, un allié. L'autre demeure son rival, un étranger. Le lien nourrit, étoffe l'esprit. Cultiver le lien c'est, à mon sens, oeuvrer pour la paix.

Le manteau est fabriqué à partir de fragments, de tessons de terre cuite. Les morceaux assemblés permettent de former un tout. Ils symbolisent la diversité, la multitude et l'unité car ils sont cousus entre eux. Ces autres liens tissent la trame qui protège la mémoire des peuples.

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